Le rapport de la Cour des Comptes sur les comptes de la Sécurité Sociale stigmatise les kinésithérapeutes libéraux au prétexte de la progression des dépenses de soins pratiqués ainsi que des disparités en matière de répartition des professionnels sur le territoire.
Le conseil national de l’Ordre déplore l’absence totale de concertation et d’échanges d’informations avec les représentants de la profession avant la publication de ce rapport.
La Cour des Comptes a une approche plus quantitative que qualitative des soins : elle déplore une augmentation des montants des dépenses mais omet d’expliquer que celle-ci est avant tout due au besoin croissant des français pour la kinésithérapie.
D’un point de vue quantitatif, il convient de rappeler que si la Sécurité Sociale rembourse davantage de dépenses de kinésithérapie c’est au profit d’une économie sur d’autres postes auxquels elles se substituent dans le cadre du virage ambulatoire.
La prétendue « inflation » dénoncée par la Cour des Comptes n’est que la juste conséquence de la diminution de la durée des hospitalisations, du vieillissement de la population que la société a choisi de maintenir à domicile, de l’augmentation des polypathologies, de la meilleure prise en charge des patients dans les plans de santé publique (plan cancer, maladies neurodégénératives ) et des compétences plus larges des kinésithérapeutes (troubles de l’équilibre, de la déglutition, de la continence…) dont le coût de l’acte moyen n’est que de 18 euros brut.
L’ordre rappelle que l’implantation des kinésithérapeutes en France est un problème commun à l’ensemble des professions de santé. La démographie des kinésithérapeutes, qui exercent toujours sur prescription médicale, est liée à celle des médecins. Réguler l’installation libérale des kinésithérapeutes ne peut se faire sans considérer tous les acteurs de santé, dont les médecins.
Enfin, il est particulièrement regrettable que la Cour des Comptes ne tienne absolument pas compte dans son analyse et dans les solutions qu’elle propose, du cadre européen, et de l’arrivée de physiothérapeutes venant de la Communauté européenne. Baisser les quotas sans considérer la libre circulation européenne qui permet à 1600 physiothérapeutes diplômés d’un autre pays européen de venir exercer en France chaque année est un non-sens.
La proposition d’imposer un exercice salarié en zone sous-dotée pour les nouveaux diplômés ne tient pas compte du coût des études et des crédits que doivent rembourser les jeunes professionnels, incompatibles avec la rémunération offerte en secteur salarié (1300 euros nets mensuels à l’hôpital public).
L’ordre réaffirme que permettre l’accès direct aux kinésithérapeutes dans le strict cadre de référentiels, est une solution qui ne peut être écartée car elle permettra une meilleure prise en charge des pathologies lourdes, chroniques impliquant nécessairement de la rééducation (AVC, SEP, maladie de Parkinson…) ou touchant des enfants atteints de pathologies évolutives ou neurologiques ou encore des personnes âgées dépendantes.
L’ordre est conscient de la nécessaire maîtrise des dépenses, mais s’opposera toujours à ce que ce contrôle se fasse au détriment de la qualité des soins nécessaires à la population, et particulièrement des patients les plus fragiles, dont la qualité de vie dépend de soins quotidiens de kinésithérapie, et du dévouement de professionnels dont les revenus sont parmi les plus faibles des professionnels de santé.
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